Faire le rêve d’un jardin partagé
A la lumière de mes premières expériences, il existe plusieurs manières d’accompagner un groupe dans un processus d’intelligence collective ou de co-création. Plusieurs méthodes, comme par exemple le « forum ouvert », s’avèrent intéressantes, mais souvent à portées limitées.
Celle que je propose dans le cadre de Fairensemble fait notamment appel à mon expérience de journaliste et de communicant et à ce que j’assimile peu à peu de ma formation en Thérapie Sociale. Davantage qu’une « recette » à suivre, c’est un moment d’imagination partagée que j’invite à vivre ensemble, vivant, en fonction du public, du temps imparti et surtout de l’objectif à atteindre, dans un état naturel de « créativité collective ».
En avril dernier, j’ai animé un forum – dans le cadre d’un week-end sur les jardins organisé dans ma ville -, dont le thème était : « Des jardins partagés, pour quoi faire ? ».
Sur le flyer de l’évènement, un texte accompagnait l’annonce du forum : « Un peu partout naissent des envies de partager des parcelles de terrain et de les gérer collectivement, en les consacrant notamment à une production écologique de légumes et de fruits. Ce forum vise à en construire ensemble une vision commune. »
Nous disposions de deux heures.
Ma proposition visait à mettre les participants dans les meilleures dispositions pour « faire ensemble le rêve d’un jardin que nous partagerions » .
Après m’être présenté, je rappelai l’intention commune de notre réunion : « Si l’on rêve qu’un jour, dans notre ville, naissent des jardins réellement partagés, alors nous devons préalablement en co-imaginer une représentation commune. Notre but aujourd’hui est d’ouvrir ensemble un espace de dialogue et de confrontations, notamment en osant regarder ensemble les éventuels sentiments qu’il y aurait à vivre ce genre d’aventure ensemble ».
Derrière nos peurs, nos méfiances et/ou nos préjugés, nous avons des besoins dont nous n’avons pas pleinement conscience (Thérapie Sociale). Je nous proposai ainsi de grandir ensemble sur le chemin de la confiance, de la responsabilité et de l’autonomie.
J’invitai les personnes à se mettre par groupes de trois, si possible avec des gens qu’ils ne connaissaient pas.
Puis j’invitai chacun :
– à raconter aux deux autres quel « jardinier partageur » il était ou il rêverait d’être
– à relever et dire ce qui les attirait et les séduisait dans ce que les autres racontaient
– à dire ce qui, dans ce qu’avaient raconté les autres, avait réveillé chez eux un sentiment de méfiance
– à réfléchir ensemble à quels genre de besoins pouvaient correspondre ces méfiances : Un besoin de subsistance ? Un besoin d’information ? Un besoin de reconnaissance ou un besoin de sécurité ?
Ce moment dura au moins ¾ d’heure, et il me fallut insister pour les arrêter, tant les discussions et les confrontations étaient passionnées.
Nous nous remîmes en grand cercle, et la parole circula librement. Les idées partagées fusèrent. Sur le paper board, j’ai pu noter les fruits de cette confrontation que je vous livre avec plaisir :
Faire ensemble le rêve d’un jardin
que nous partagerions
(ou un rêve de partager nos jardins)
Notre jardin serait un lieu de partage de connaissances,
de vie sociale, de liens intergénérationnels, de transmission, d’éducation,
de créativité, de plaisir, d’aventure collective
Dans ce jardin nous respecterions chacun dans sa sphère privée,
en protégeant sa liberté de cultiver sa propre parcelle
Ce jardin serait un espace de rencontre avec la nature,
un chemin vers la tolérance et la conscience de l’unicité du monde
Ce jardin serait un lieu d’épanouissement, de réflexion et
de méditation, en contact avec soi et/ou avec les autres
Ce jardin serait un cercle de confrontation
de nos différentes visions du monde,
afin d’y rechercher nos accords, avec le temps.
Yves Lusson
Laisser un commentaire